Bullshit jobs 2.0 : ces métiers nés de l’IA qui cartonnent en 2025

On croyait avoir tout vu. Après les chief happiness officers, les feel good managers et les experts en bien-être numérique, voilà que 2025 nous gâte avec une nouvelle génération de métiers… comment dire ? Difficiles à expliquer à un dîner de famille.

Entre l’intelligence artificielle qui remplace tout — ou presque — et la quête désespérée de “sens au travail”, notre époque enfante des professions à la frontière du ridicule et du génie. Des métiers qui existent vraiment, souvent bien payés, mais dont l’utilité… reste un mystère.

Bienvenue dans le monde fascinant (et un peu flippant) des jobs absurdes de 2025.


Quand chuchoter à une IA devient un métier

Non, ce n’est pas une blague. En 2025, certaines entreprises recrutent des “prompt whisperers”. Leur mission ? Parler à l’intelligence artificielle. Mais pas n’importe comment : avec tact, sensibilité et… vocabulaire calibré.

Ces spécialistes du langage numérique doivent “coacher” ChatGPT, Midjourney ou Gemini pour que la machine produise le bon ton de voix, la bonne émotion, le bon style.
Leur slogan officieux : « L’IA, c’est bien, mais l’IA polie, c’est mieux. »

Le plus drôle ? Ces métiers sont très demandés dans le luxe. On veut de l’IA, oui, mais pas vulgaire. Alors on paie des humains pour “humaniser” des machines censées… nous remplacer.
Le serpent se mord la queue, élégamment parfumé à la vanille algorithmique.

👉 Lire aussi sur MondeDuTravail.fr : “Travailler dans l’IA, la RSE ou la transition ? Les jobs d’avenir en 2025”


Le retour du silence… managé

Dans les open spaces de 2025, tout le monde travaille en visioconférence, casque vissé sur les oreilles, IA de transcription en fond. Et pourtant, le moindre bruit parasite peut faire dérailler l’écosystème numérique.
C’est là qu’intervient un nouveau héros : le Manager du Silence.

Son rôle ?
Surveiller les décibels, instaurer des zones “zéro bruit”, installer des capteurs, et rappeler aux collègues que taper sur un clavier mécanique, c’est une agression sonore.
Le comble : certaines start-up créent désormais des “comités de gouvernance du silence”. Oui, ça existe.

Le paradoxe est total : on invente un poste pour contrôler… la tranquillité. À force d’optimiser le moindre souffle, on finit par travailler dans une bulle aseptisée où la vie même devient un bug.


Quand il faut réparer… les erreurs de l’IA

L’automatisation devait tout simplifier. Mais voilà : les IA se trompent, hallucinent, ou mélangent les prénoms dans des mails importants.
Résultat : des entreprises recrutent des “Dé-botteurs d’IA” (ou AI Undoers). Leur travail ? Passer derrière la machine pour corriger ses bourdes.

On leur confie la noble tâche de “re-humaniser le texte”, “rendre une image moins robotique” ou “corriger le ton d’un chatbot trop froid”.
C’est un peu comme embaucher quelqu’un pour nettoyer après un robot ménager.

Sociologiquement, c’est passionnant : plus les machines prennent le pouvoir, plus on crée des métiers… pour réparer les dégâts de leur autonomie.
C’est ce que le sociologue David Graeber appelait déjà des “bullshit jobs” — ces emplois si inutiles que même ceux qui les occupent ont du mal à expliquer à quoi ils servent (source).


Le coordinateur des robots sympathiques

Vous avez peut-être déjà croisé ces robots-livreurs à roulettes qui circulent sur les trottoirs. En 2025, ils ne se contentent plus de livrer : ils sourient, parlent, racontent des blagues.
Et devinez quoi ? Quelqu’un doit vérifier qu’ils ne dépassent pas les limites du “cool”.

Le Coordinateur de territoire robot-livreur gère ces créatures connectées : il choisit les itinéraires les plus “amicaux”, supervise leur ton de voix, et veille à ce qu’aucun robot ne dise “bonjour” de manière trop insistante à un passant.

Le monde est devenu une gigantesque comédie algorithmique : les humains coachent des machines pour paraître humaines, pendant que les vrais humains deviennent invisibles.


L’éthicien·ne des émotions artificielles

Vous pensiez qu’un psychologue pour chatbot, c’était de la science-fiction ? Détrompez-vous.
Les entreprises de la relation client ou du marketing recrutent désormais des “éthiciens émotionnels de l’IA”. Leur mission : s’assurer que les intelligences artificielles ressentent correctement.

On leur demande d’évaluer le ton des bots, d’ajuster leur “empathie simulée”, de vérifier que leurs blagues ne dépassent pas les bornes culturelles.
En clair : on a inventé un métier pour réguler les émotions d’un être qui n’en a pas.

C’est drôle, c’est absurde, et c’est révélateur. Plus nos outils deviennent puissants, plus nous cherchons à les humaniser. Même si cela revient à confier à quelqu’un le rôle de “gardien du ressenti d’un circuit imprimé”.

👉 Lire aussi sur MondeDuTravail.fr : “Le bore-out : ce mal silencieux au travail”


Pourquoi on en arrive là

Ces métiers n’apparaissent pas par hasard. Ils sont le produit d’une époque où l’on confond innovation et sens.
Chaque nouvelle technologie crée un écosystème de fonctions périphériques : on ne veut pas perdre l’humain, mais on ne sait plus trop quoi lui faire faire.

Et puisque le travail reste au cœur de notre identité, on invente des tâches “à valeur symbolique” : vérifier le ton d’un robot, chuchoter à une IA, manager le silence.
On donne ainsi l’illusion que l’humain garde la main, alors qu’il n’est souvent plus qu’un accessoire dans la grande pièce de théâtre numérique.

👉 À lire sur MondeDuTravail.fr : “Les risques psychosociaux au travail : ce que tout salarié devrait savoir”


Derrière le rire, une vraie question de société

Rire de ces “jobs absurdes”, c’est facile. Mais il faut aussi s’interroger.
Quand 30 % des actifs déclarent ne pas comprendre l’utilité de leur poste, comme le rappelait une étude reprise par The Guardian, c’est le sens même du travail qui vacille.

Dans un monde obsédé par la productivité, nous sommes paradoxalement entrés dans une ère où le travail devient de plus en plus symbolique : il faut montrer que l’on travaille, plus que réellement produire.

C’est là que la notion de bullshit job devient précieuse : elle met le doigt sur ce malaise moderne où tout semble tourner à vide, dans un ballet bien huilé de titres ronflants et de réunions PowerPoint.


Et demain ?

Dans dix ans, on rira sans doute de ces métiers comme on rit aujourd’hui des “dactylographes de fax” ou des “vidéothécaires”.
Mais il restera une question : à quoi bon créer du travail pour occuper le vide ?

L’IA n’est pas le problème. C’est notre manière de nous y adapter. Tant qu’on cherchera à sauver coûte que coûte la symbolique du travail plutôt que sa valeur réelle, d’autres métiers absurdes verront le jour : “curateur de mémoire artificielle”, “coach en authenticité algorithmique” ou “facilitateur d’éthique quantique”.

Et qui sait ? Peut-être que l’un d’entre eux figurera bientôt sur votre profil LinkedIn.


💡 À retenir

En 2025, le travail n’est plus seulement une fonction : c’est une mise en scène.
Et tant que nous continuerons à confondre “occupation” et “utilité”, le marché continuera d’inventer de nouvelles manières de donner du sens… à l’absurde.

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