Camille ne savait pas à quoi s’attendre. À 26 ans, fraîchement recrutée dans un groupe industriel, elle se retrouvait propulsée dans un open space sans repères. Des visios sans fin, des acronymes obscurs, des collègues invisibles… L’envie de bien faire était là, mais les clés manquaient. Jusqu’au jour où on lui a présenté Hakim, son mentor. Un cadre expérimenté, calme et direct, qui lui a offert plus qu’un accompagnement : une boussole.
Cette scène, désormais banale dans les grandes comme les petites entreprises, illustre à merveille la montée en puissance du mentoring professionnel. En 2025, ce dispositif dépasse largement la simple transmission d’expérience. Il est devenu un outil stratégique pour répondre aux grands défis du monde du travail : fidéliser les talents, accélérer les intégrations, favoriser la diversité, stimuler la culture de l’apprentissage.
Un levier humain dans un monde en mutation
Les bouleversements sont légion : télétravail devenu norme, génération Z en quête de sens, transitions technologiques permanentes, injonction à l’agilité… Dans ce tumulte, le mentorat réintroduit une relation de confiance, structurée, entre humains.
Contrairement au coaching ou au tutorat, souvent plus ponctuels et orientés performance, le mentorat s’inscrit dans le temps long. Il s’appuie sur le volontariat et l’écoute. Le mentor n’est pas un supérieur hiérarchique, mais un pair plus expérimenté, capable de transmettre ce que les logiciels ne peuvent pas : le savoir-être, la culture d’entreprise, la capacité à prendre du recul.
Des chiffres qui parlent
Selon une étude de Deloitte publiée en 2024, 68 % des jeunes salariés bénéficiant d’un mentorat souhaitent rester dans leur entreprise sur le long terme, contre seulement 32 % parmi les non-mentorés.
De son côté, LinkedIn Learning observe une hausse de 23 % de la productivité dans les équipes où le mentoring est structuré. Et pour les mentors eux-mêmes ? 58 % déclarent avoir développé des compétences relationnelles utiles à leur propre évolution.
Un outil d’intégration, mais aussi d’élévation
Le mentorat trouve sa place dès l’arrivée dans l’entreprise, pour faciliter l’onboarding, éviter les erreurs classiques, et aider les nouveaux venus à décoder les non-dits. Mais il ne s’arrête pas là.
Dans un contexte où les compétences techniques deviennent obsolètes en cinq ans, selon le World Economic Forum, le mentorat soutient l’apprentissage continu, l’adaptabilité et le développement personnel.
Il agit également comme un révélateur d’égalité. Les grandes entreprises comme Orange, BNP Paribas ou Thales l’ont bien compris : en ouvrant l’accès au mentorat à toutes et tous, on réduit les inégalités d’information, de réseau et d’opportunités. Le rapport “Diversity Wins” de McKinsey souligne que les entreprises ayant mis en place un mentorat inclusif ont 38 % de chances supplémentaires de voir émerger une gouvernance diversifiée.
Une palette de formats, pour une multitude de besoins
Le mentorat n’a pas de forme unique. Il se décline :
- en version classique, entre un senior et un junior ;
- en reverse mentoring, où un jeune salarié aide un cadre à appréhender les outils digitaux ou les codes générationnels ;
- en mentorat croisé, entre services ou filiales ;
- voire en e-mentoring, totalement à distance.
Le plus important n’est pas la formule, mais la qualité de la relation. Une relation qui repose sur la confiance, la disponibilité, la bienveillance, mais aussi la rigueur.
Quand les entreprises structurent leur stratégie
Ce n’est plus un gadget RH. Aujourd’hui, près de 74 % des entreprises du CAC 40 ont mis en place un programme de mentoring formalisé, selon le Baromètre Cegos RH 2024. Certaines en font même un axe de développement stratégique.
Orange a mentoré plus de 2 000 salariés entre 2020 et 2024. BNP Paribas déploie des binômes mentor/mentoré à l’international, et Thales mise sur le mentorat inversé pour accompagner sa transformation numérique.
Une dynamique à double sens
Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas uniquement les mentorés qui en tirent des bénéfices. Les mentors eux-mêmes renforcent leur leadership, leur capacité à écouter, à guider sans diriger. C’est aussi pour eux une manière de valoriser leur parcours, de se sentir utiles autrement.
« Mentorer m’a redonné du sens. J’ai compris que je pouvais transmettre sans imposer », confie Hakim, cadre technique chez Safran.
Des recommandations concrètes, mais sans rigidité
Pour qu’un programme de mentorat soit efficace, pas besoin d’un manuel de 50 pages. Il suffit souvent de :
- sélectionner les duos avec soin (affinités, attentes croisées) ;
- proposer un cadre souple mais clair (durée, fréquence, confidentialité) ;
- former les mentors (écoute active, posture) ;
- valoriser leur engagement (visibilité interne, temps reconnu, formations offertes).
Des ressources comme Cap Mentorat, Mentorink, ou encore Great Place to Work proposent de nombreux conseils concrets pour structurer sa démarche.
Un levier d’avenir, profondément humain
Dans un monde où l’IA génère des rapports, où les procédures se digitalisent à grande vitesse, le mentorat agit comme un antidote à la déshumanisation du travail. Il crée du lien, de la mémoire, de la confiance.
Il ne suffit pas de recruter des talents : il faut leur donner les moyens de grandir, et leur montrer qu’ils comptent.
En 2025, miser sur le mentoring, c’est miser sur l’intelligence relationnelle comme moteur de performance durable.
Pour aller plus loin:
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